« Malheur à l’homme seul » : la corruption dans le système judiciaire de Bangui, en République centrafricaine
Evaluation externeLadislas de Coster, Cheyanne Scharbatke-Church et Kiely Barnard-WebsterRéalisé pour les projets d'apprentissage collaboratif de la CDA
Les programmes de réforme du système de justice pénale en République centrafricaine (RCA) ignorent le rôle de la corruption comme facteur de dysfonctionnement du secteur de la justice. Néanmoins, en ne s’attaquant pas à l'abus de pouvoir à des fins personnelles par les acteurs du système, les objectifs de la réforme préconisée par la communauté internationale ne sont pas réalisables. Certains aspects de ces programmes semblent même alimenter le système de corruption plutôt que d'assainir le secteur judiciaire. Le projet Corruption, Légitimité et Justice a mené 115 entretiens d'informateurs clés, qu’ils soient acteurs de la chaîne pénale, citoyens ou membres de la communauté internationale à Bangui en juillet 2017. Il vise à contribuer à la formulation d'un programme de lutte contre la corruption plus efficace. Il met dès lors en évidence que injecter plus de ressources financières dans la chaîne pénale conduit à distribuer plus de biens et de récompenses aux mêmes bénéficiaires de la corruption. En conséquence, si la communauté internationale souhaite une véritable réforme en RCA, il est nécessaire de procéder à une refonte complète des programmes de réforme de la chaîne pénale. La volonté de penser et de travailler politiquement est essentielle pour obtenir un réel changement dans ce contexte. Les principaux bailleurs devraient mettre en œuvre une stratégie intégrée permettant d’atteindre les moteurs de la corruption et ce au plus haut niveau hiérarchique. La théorie démontre que d’aborder des facteurs politiques est en général plus efficace pour créer du changement que les volumes financiers investis ou même la qualité technique des programmes
L'étude met en lumière les principales conclusions suivantes :
1. L'extorsion/les pots-de-vin, les faveurs sexuelles, le favoritisme et l'ingérence politique déforment chaque aspect de la chaîne pénale et mettent la justice hors de portée des citoyens ordinaires.
2. La corruption dans la chaîne pénale est un système alimenté par de multiples facteurs tels que la survie et le leadership corrompu ainsi que les normes sociales qui font de la corruption un choix rationnel.
3. L'impunité pour le crime et la corruption créent une profonde méfiance à l'égard du système, délégitimisent les institutions étatiques et encouragent les actes de vengeance et la justice populaire.
4. Le conflit Séléka/anti-Balaka a amplifié la dynamique de la corruption car les acteurs de la chaîne criminelle cherchent à se venger et à récupérer les biens perdus dans un contexte d'érosion des valeurs.
Pour lire l'étude complète, vous pouvez y accéder ici.